Désobéir en démocratie
Mon propos s’inscrit dans un programme de recherche sur les « politiques du dissensus ». Il existe toute une tradition de pensée, où je situe mon travail, qui définit le politique comme champ irréductible de conflits, divisions, luttes, rapports de force, et la démocratie comme cette forme de société qui, loin de refouler le conflit ou de vouloir le dépasser, en reconnaît la légitimité et la fécondité. Tradition philosophique hétérogène, où l’on trouve des théories aussi différentes que la « division originaire du social » de Claude Lefort[4], le « différend » de Jean-François Lyotard[5], la « mésentente » de Jacques Rancière[6], la « démocratie conflictuelle » d’Etienne Balibar[7] ou « l’agonisme » d’Ernesto Laclau et Chantal Mouffe[8] – pour ne citer que quelques références centrales, sans évoquer celles, plus massives encore, que sont la « lutte des classes » chez Karl Marx ou la « résistance » chez Michel Foucault.
J’appelle dissensus toute situation où le politique fait l’épreuve de son indétermination radicale – manifestant la conflictualité intrinsèque de toute hiérarchie sociale, de toute identité culturelle, de tout dispositif institutionnel. Et j’appelle politiques du dissensus les pratiques citoyennes et/ou gouvernementales qui orientent cette conflictualité irréductible dans le sens de l’émancipation individuelle et collective. Dans le contexte historique qui est le nôtre, ces pratiques dissensuelles me semblent être celles qui cherchent à sortir de l’impasse « national-libérale »[9].
Une telle politique du dissensus rejoint les thèses exposées par Chantal Mouffe dans L’illusion du consensus[10]. Mouffe montre l’impasse de la gouvernementalité dite « néolibérale » fondée sur le « pragmatisme » et le « consensus », et qui prétend substituer les experts aux leaders politiques, et la gestion des risques à l’expression des conflits. Impasse, car le conflit étant inéliminable, mais ne pouvant plus s’exprimer dans l’espace politique sous une forme agonistique entre adversaires (selon un axe droite/gauche), il s’exprime dorénavant sous forme antagonistique entre ennemis (selon une polarité « Nous »/« Eux », ceux-ci désignant aussi bien les élites que les étrangers et immigrés). D’où le plaidoyer de Mouffe pour proposer une véritable alternative « contre-hégémonique » au libéralisme, mais sans illusion de quelque « sortie du capitalisme » ou « dépérissement de l’État » qui éliminerait tout conflit – ce en quoi le « socialisme » de Mouffe se distingue décisivement du communisme[11].
C’est ici que la question de la désobéissance civile rejoint celle de la démocratie entendue comme transformation des antagonismes en agonismes, ou du dissensus comme indétermination du politique. La désobéissance civile, en effet, n’est pas un conflit comme un autre, puisqu’elle s’autorise de principes constitutionnels qui se situent en amont de tout conflit. Les protagonistes du dissensus démocratique, pour se reconnaître comme adversaires au sein d’un espace commun, doivent s’accorder au moins sur un socle de normes et de valeurs fondamentales rendant possible ce dissensus. La désobéissance civile est donc une forme de conflit paradoxale, qui ramène les protagonistes du jeu démocratique à une sorte de « méta-consensus » auquel le pouvoir en place dérogerait, motivant ladite désobéissance citoyenne. Celle-ci révèlerait donc le consensus « constitutionnel » qu’il faudrait logiquement présupposer « avant » toute politique du dissensus, tout agonisme démocratique.
Nous sommes ainsi au cœur du débat qui oppose les théories du conflit radical (comme celle de Chantal Mouffe ou celle que j’essaie d’élaborer) et les théories de la justice de John Rawls, Jürgen Habermas ou même Axel Honneth (chez qui la « lutte pour la reconnaissance » repose encore sur des intuitions morales en principe universalisables). Pour ces philosophes, c’est le consensus rationnel sur les principes de justice qui rend possible le débat démocratique. Ils honorent la désobéissance civile comme l’acte politique par lequel le citoyen cherche à restaurer ce socle constitutionnel transcendantal mis à mal par quelque loi ou décision iniques du pouvoir en place[12].
Le point de divergence fondamental touche à la possibilité même d’une déduction transcendantale de ce socle constitutionnel. Dans la perspective où je me situe, rien ne doit être soustrait au dissensus, au débat agonistique, pas même le socle de valeurs fondamentales ou la nature des institutions démocratiques. Comme l’écrit Claude Lefort, « la démocratie s’institue et se maintient dans la dissolution des repères de certitude. Elle inaugure une histoire dans laquelle les hommes font l’épreuve d’une indétermination dernière, quant au fondement de la Loi, du Pouvoir et du Savoir, et au fondement de la relation de l’un avec l’autre, sur tous les registres de la vie sociale »[13]. Pour autant, il n’y a pas lieu de verser dans le relativisme. Que la démocratie ne repose sur aucun fondement rationnel, transcendantal, ne signifie pas qu’elle ne soit pas préférable à la dictature ou au totalitarisme. Mais si la démocratie est effectivement un « meilleur » régime de ces derniers, c’est eu égard aux conditions historiques qui sont celles de la modernité, caractérisée par l’émergence de l’État et l’individualisation des formes d’existence. La démocratie n’est pas préférable parce qu’elle serait ce modèle politique que tout citoyen rationnel choisirait dans des conditions idéalisées, mais parce qu’elle est la forme politique la plus adéquate à la « figure de l’esprit » (pour parler comme Hegel) ou au « mode de subjectivation » (pour parler comme Foucault) qui nous constituent historiquement[14]. Au risque d’accumuler les références écrasantes, je dirais de la démocratie ce que Sartre disait du marxisme, à savoir qu’elle est « l’horizon indépassable de notre temps » – ce qui ne signifie pas qu’elle soit éternelle, mais au contraire que la préférence que nous lui accordons n’est qu’historique, liée aux conditions particulières de la société moderne. Il y a bien un socle de base démocratique auquel les acteurs doivent effectivement obéir pour pouvoir entrer en conflit, mais ce socle est historique, contingent, donc lui-même ouvert à la discussion et à la contestation démocratiques.
Il nous faut donc envisager les rapports entre socle constitutionnel et désobéissance civile d’une manière inverse de Rawls ou Habermas. A leurs yeux, la désobéissance civile est ce moment où les citoyens déclarent leur adhésion au socle constitutionnel – à travers un acte de conscience morale qu’ils opposent au pouvoir en place –, alors que selon mon opinion, la désobéissance est plutôt le moment d’une mise à l’épreuve de ce socle, une manière de mettre la communauté en conflit avec elle-même, sur ce qui la fonde. Les rapports entre consensus et dissensus s’inversent. Alors que chez Rawls, la désobéissance civile, en tant qu’elle « s’adresse au sens de la justice de la majorité de la communauté », est un appel au consensus moral, je pense pour ma part que désobéir en démocratie, c’est en éprouver les fondements au moment où elle peut vaciller, c’est en appeler au sens du dissensus, voire de l’insoumission. En d’autres termes, la démocratie est ce régime dont la légitimité repose paradoxalement sur la capacité des citoyens à le remettre en cause.
Si la désobéissance civile est constitutive de la démocratie, c’est donc au sens où la possibilité de la désobéissance y est au fondement même de l’obéissance. Être citoyen en démocratie, c’est se soumettre à la loi en exerçant une vigilance critique permanente qui ne peut être active, effective que si la possibilité de l’insoumission, voire de l’insurrection est toujours-déjà préservée. En conséquence, il est rigoureusement impossible de fonder la désobéissance civile – impossible, autrement dit, d’établir quelque critère juridico-moral permettant de distinguer, parmi les actes de désobéissance, ceux qui seraient légitimes de ceux qui ne le seraient pas. C’est pourtant sous l’enseigne d’une telle conception « jusnaturaliste » que l’on nvisage habituellement la question de la désobéissance civile, comme si désobéir révélait un ordre de légitimité supérieur à la positivité du droit. Comme si la désobéissance était un acte moral, comme si nous avions le pouvoir de nous mettre dans une sorte de surplomb moral par rapport au champ politique. Au contraire, toute la valeur de la désobéissance civile tient plutôt, me semble-t-il, dans sa dimension proprement politique, c’est-à-dire énonciatrice, performative, qui consiste à renvoyer le droit à l’énigme de sa fondation, à obliger le pouvoir et la communauté à s’interroger sur ce qu’ils sont.
C’est pourquoi il me paraît vain de vouloir établir des critères moraux qui permettraient de distinguer les modes de résistance ou de désobéissance qui seraient légitimes, de ceux qui seraient illégitimes, comme il me paraît tout aussi vain de vouloir tracer une frontière stricte entre la désobéissance « civile » proprement dite et ce qui la déborderait, en amont et en aval – en amont, les gestes de résistance que l’on pourrait qualifier « d’infra-juridiques » (en ce qu’ils ne s’exposent pas à la sanction judiciaire), et en aval les moments de refondation totale de l’ordre juridique que sont les révolutions. Autrement dit, il n’y a pas de désobéissance civile « pure », mais un continuum de pratiques dissensuelles livrées à l’indétermination de leur origine (pourquoi désobéit-on ?) et de leurs effets (quelles sont les fins de la désobéissance ?). Je propose donc de tracer les contours d’une approche réaliste, politique, non mythologique, de la désobéissance civile.
Toutes sortes de désobéissances plus ou moins nouvelles s’expérimentent aujourd’hui : occupations de place, arrachages de plants transgéniques, démontages de fast-foods américains, opérations de boycott, soutiens aux sans-papiers, lanceurs d’alerte, dissidence numérique, « hacktivisme », etc. Tout cela est à observer et à penser. Mais on ne peut qu’être frappé (et amusé) par les trésors d’ingéniosité déployés par les théoriciens de la désobéissance civile pour amarrer ces initiatives hétérogènes à quelque grande mythologie qui courrait d’Antigone à Nelson Mandela, en passant par Thoreau, Gandhi, Martin Luther King, et qui permettrait d’ériger la désobéissance civile en principe éthique et politique intangible, à partir d’une définition calibrée au millimètre[15], dont la formule canonique est à peu près celle-ci : une infraction intentionnelle, publique, non violente, dont le but est d’amener un changement dans la loi ou la politique du gouvernement en vue de défendre ou d’approfondir la démocratie. Or rien n’est évident dans cette définition – que ce soit quant à la question des fins visées ou celle des moyens utilisés (pour reprendre une distinction « fin-moyen » qui est en elle-même problématique quand il s’agit d’analyser la praxis politique).
- Quant à la question des fins visées par l’acte de désobéissance, je doute qu’on puisse établir quelque critère permettant de distinguer une désobéissance « civile », c’est-à-dire légitime (c’est-à-dire encore, dans l’idée de certains : juridiquement fondée) d’une autre qui ne le serait pas. Pourquoi considérer comme un glorieux acte de désobéissance civile le refus d’un directeur d’école de fournir des renseignements au sujet d’un élève dont les parents sont en situation irrégulière, ce qui pourrait mener à leur interpellation (et leur expulsion), et non le refus d’un officier d’état civil de célébrer un mariage entre personnes de même sexe ? Au nom de quoi honorer telle occupation de place, ou tel campement pour s’opposer à la construction d’un aéroport, mais dénoncer le réflexe « NIMBY » de riverains contre l’installation d’un centre de réfugiés dans leur village ? « Au nom de » quoi ? Au nom des droits de l’homme, répondra-t-on. Mais on parle bien ici d’un droit naturel, antérieur et supérieur au droit positif, dont la conscience du citoyen est seul juge, ce qui suppose « que soient réunies des conditions épistémologiques permettant de dénoncer de façon infaillible l’injustice ou l’illégalité de l’acte auquel on entend s’opposer »[16]. Je conteste que quelque citoyen puisse prétendre connaître avec certitude la vérité du droit et faire, sur cette base, une interprétation incontestable de l’incompatibilité entre le droit invoqué et telle loi positive à laquelle il s’autoriserait, du fait de cette incompatibilité, à désobéir. Car comment tranchera-t-on le conflit entre telle conviction que c’est Dieu qui est au-dessus du pouvoir, telle autre conviction que ce sont les Droits de l’Homme, telle autre encore que c’est la Révolution ? Comme il est impossible de trancher, chacun sera renvoyé à sa conviction, sa conscience, sa vérité. Aura-t-on affaire à des consciences morales supérieures ou à des « ego-démocrates »[17]? A des Antigones ou à des Narcisses ?
Une version plus « faible » consisterait à fonder la nature juridico-morale de la désobéissance civile, non pas sur quelque droit « naturel », mais sur le socle constitutionnel « positif » en vigueur dans les démocraties. Mais cela revient alors à faire de la désobéissance civile une sorte de stade ultime de contrôle de constitutionnalité, autorisant derechef n’importe quel citoyen à se mettre en position de surplomb par rapport au législateur lui-même…
- Quant à la question des moyens utilisés, je conteste tout autant le critère de non-violence canoniquement avancé pour attester du caractère « civil » de la désobéissance. Qu’est-ce que la non-violence ? Entre le refus d’obtempérer (« résistance passive ») et l’arrachage de plants transgéniques (qui viole la propriété privée et le travail d’autrui), il y a certes une différence, mais est-elle de nature ou de degré ? Entre Gandhi et Lénine (pour prendre deux figures tutélaires et antithétiques), y a-t-il opposition radicale de modèles politiques, ou un continuum complexe de pratiques et de stratégies ?[18] À une autre échelle, ira-t-on jusqu’à louer le refus de payer l’impôt parce que c’est un acte non violent, et dénoncer les piquets de grève ou les barrages filtrants au prétexte qu’ils sont attentatoires aux libertés d’autrui ?
Au demeurant, l’acte de désobéir n’est-il pas justifié par la violence que l’on impute au gouvernement ou au pouvoir en place ? Dans ce cas, pourquoi l’usage de la violence (insurrection, résistance armée) ne serait-il pas justifié en retour ? Personne ne conteste les raisons qui poussèrent les résistants, pendant l’Occupation, à faire sauter des trains ou à éliminer des « collabos ». C’est donc une autre opposition canonique qu’il faudrait sans doute soumettre à la critique, celle entre désobéissance civile et résistance à l’oppression : la première qui supposerait l’État de droit (puisque c’est au nom de ses principes qu’on est censé désobéir), la seconde qui serait un « droit naturel » de tout peuple de se défaire d’un pouvoir tyrannique. Pourtant, la première ne se justifie réellement que parce qu’on juge être, en quelque manière, dans la situation de la seconde[19].
Ni les droits de l’homme (comme finalité) ni la non-violence (comme moyen) ne me paraissent donc des critères incontestables permettant de qualifier telle désobéissance de « civile », donc « légitime », par opposition à une vulgaire infraction pénale ou administrative. C’est sans doute pour conjurer cette indétermination que s’est édifiée au fil du temps une sorte de « grand récit » incantatoire de la désobéissance civile – avec sa figure mythologique originaire (Antigone), ses héros modernes (Gandhi, Martin Luther King), ses théoriciens officiels (Thoreau, Arendt) et ses séquences fameuses (l’abolition de l’esclavage et le mouvement des droits civiques, la Résistance, l’opposition à la guerre du Vietnam, le droit à l’avortement, etc.) qui confèrent aux combats d’aujourd’hui (les réfugiés, le développement durable, la « crise » de la mondialisation capitaliste) une légitimité historique qui se veut incontestable, puisque fondée sur « un rapport intense au passé, comme impératif de fidélité »[20].
Une telle mythologie ne répond-elle pas aussi au besoin de réduire la conflictualité immanente au politique, de conjurer le risque de guerre civile ou intestine, de stasis, que recèle tout acte de désobéissance ou de rébellion ? Comme s’il fallait tenir la désobéissance civile aussi éloignée que possible du gouffre ou de l’abîme sur lequel elle ouvre pourtant, en subordonnant le conflit à un lieu ou un horizon de souveraineté – soit sous la forme du tribunal, du tiers capable d’imposer sa légalité et sa légitimité au-dessus des protagonistes en conflit, soit sous la forme du corps (armée, parti, mouvement ) triomphant de ses ennemis – mais dans les deux cas, on trouve toujours quelque souveraineté mettant fin à toute conflictualité. La désobéissance civile est le plus souvent pensée comme expression d’une conscience souveraine, qui tantôt s’érige en juge du pouvoir en place, tantôt se projette en avant-garde d’un mouvement qui cherche à le renverser en vue d’une refondation totale des institutions.
La première figure (celle du désobéissant comme juge, tribunal) est exemplairement celle de Thoreau[21], qui refusa de payer l’impôt pour protester contre l’esclavage et la guerre contre le Mexique – posture peu signifiante (il ne passa qu’une nuit en prison, avant de laisser sa tante acquitter l’impôt à sa place), moins en tout cas que sa retraite de deux ans à Walden dans une cabane dans les bois – retraite entamée un 4 juillet (jour symbolique s’il en est), comme si Thoreau avait voulu réitérer un geste d’installation, un moment d’origine (initié par sa seule conscience morale) contre une société qu’il estimait corrompue.
La seconde figure (celle du désobéissant comme avant-garde) se retrouve chez un Toni Negri par exemple, quand il fait l’éloge des jacqueries urbaines, prélude au soulèvement prochain de la « Multitude » contre « l’Empire », ou chez Rancière célébrant l’insurrection à la fois permanente et ponctuelle du « politique » contre la « police » étatique, juridique, gestionnaire[22]. Ce qui m’apparaît encore discutable dans cette conception, c’est l’idée que la désobéissance resterait de l’ordre de la socialité d’exception, c’est-à-dire d’un régime de discours ou de pratique à distance du pouvoir et de ses intrigues. Or précisément, dans l’optique d’une théorie de la démocratie radicale et radicalement dissensuelle, il me paraît nécessaire d’arracher la désobéissance civile à la mythologie qui l’entoure, pour la rendre à son indétermination dernière : désobéir, ce n’est pas faire entendre la voix de la conscience morale contre le Mal ou l’Injustice, ni celle des « sans-parts » contre la police étatique, mais introduire le dissensus dans la communauté, interroger ce qui la fonde en forçant la confrontation, obliger l’État à se redéfinir en le mettant à l’épreuve. Rien ne peut garantir que la désobéissance ne dégénérera pas en stasis (aucun tribunal transcendantal ni aucun telos historique). Contre ce risque de dissolution de la communauté, il n’y a que la civilité des protagonistes, leur souci de ménager un espace de négociation en vue d’un nouveau régime de droit et d’obéissance.
En d’autres termes, il faut en finir avec Antigone – la pure, l’héroïque, la solitaire s’élevant contre un Créon autoritaire, arrogant, soupçonneux[23]. Comme y a insisté Castoriadis (et comme le redit Philippe Gérard dans son beau texte sur les « enjeux politiques d’Antigone »), la tragédie de Sophocle n’est pas du tout un pamphlet contre la loi positive et pour la loi divine, mais une oscillation constante entre les deux positions, qui s’achève par « un éloge de celui qui est capable de tisser ensemble les lois du pays et la justice des dieux » (…). « La catastrophe se produit parce que Créon comme Antigone se crispent sur leurs raisons, sans écouter les raisons de l’autre ». « Ce que glorifient les derniers vers du chœur, ce n’est pas la loi divine – mais le phronein » [24] – que rend si mal le terme « prudence » – il vaudrait mieux parler de justesse ou de civilité.
Dans La démocratie sans « demos »[25], Catherine Colliot-Thélène propose une conception à la fois radicale et lucide de la démocratie non pas centrée sur la catégorie de peuple, mais sur celle de sujet de droit. Le sujet politique moderne ne se définit pas en termes d’appartenance, d’identité participative (Nation ou prolétariat) à l’élaboration des lois (elle parle du « mythe de l’autolégislation »[26]), mais en termes d’exercice et de revendication de droits. La révolution opérée par la modernité, c’est d’avoir mis un terme au pluralisme juridique, c’est-à-dire à l’emprise des communautés d’appartenance sur les individus, au bénéfice de la seule puissance étatique. La fameuse formule de Max Weber définissant l’État par « le monopole de la violence légitime » est le plus souvent interprétée comme un rejet des doctrines du droit naturel, alors qu’elle est avant tout l’expression d’un strict monisme juridique (position, on le sait, qui était aussi celle de Kelsen). Autrement dit, l’individualisation des droits n’aurait pu voir le jour sans la montée en puissance de l’État.
Colliot-Thélène nous invite par conséquent à accepter la « structure dissymétrique » du pouvoir, à savoir le fait que les revendications émanant des sans-parts (pour parler comme Rancière) « n’ont pas de sens si elles n’ont pas de destinataires, et que c’est précisément de ces destinataires que dépend la conversion des revendications en droits au sens propre du terme »[27]. Même dans un acte de désobéissance, il ne faut pas voir l’expression d’une subjectivité morale se dressant contre le pouvoir, mais une adresse politique faite à son égard. Dans le cas des migrants, par exemple, on aura beau dénoncer la répression insupportable de l’État, aucune émancipation de ces derniers n’est pourtant envisageable sans sa médiation. Toute résistance même violente au pouvoir d’État (occupation de locaux, grève de la faim) est en même temps une revendication qui lui est faite pour qu’il remplisse les missions de protection et d’intégration qui devraient être les siennes[28]. Aussi banal que cela paraisse, il est toujours bon de rappeler que la démocratie se joue « dans le rapport des gouvernés aux gouvernants »[29] – et que ce rapport, contrairement à ce que véhicule le mythe de la souveraineté populaire, n’est jamais un rapport réciproque (même médié par les institutions représentatives).
Dans des termes assez semblables, Étienne Balibar parle quant à lui, pour définir la démocratie, d’un « différentiel d’insurrection et de constitution qu’aucune représentation purement formelle ou juridique de la politique ne peut résumer »[30] – signifiant par là que la démocratie suppose à la fois des sujets de droit qui contestent, revendiquent, s’insurgent, et un État capable d’imposer un compromis « hégémonique » (pour parler comme Gramsci) aux forces sociales en présence. C’est ce que Balibar a appelé le « Théorème de Machiavel » : « C’est dans la mesure où les luttes de classes (qui forment le noyau ou – à d’autres égards – le modèle d’un ensemble de mouvements sociaux) conduisent la “communauté” au point de rupture (ou au bord de la dissolution) qu’elles contraignent le pouvoir de l’État (et des classes dominantes) à l’invention institutionnelle, à laquelle elles fournissent en retour une matière non pas simplement “sociale” mais proprement politique. Il en résulte tendanciellement un régime de conflit, instable voire périlleux, mais hors duquel des crises fondamentales ne seraient ni traitées ni reconnues comme telles »[31]. L’allusion à Machiavel fait bien évidemment référence à la division de toute Cité entre deux « humeurs », deux « partis » (celui du peuple et celui des Grands) et à la position du Prince que Machiavel invitait à prendre parti pour le peuple – surtout dans les situations de « crise » que manifestent, entre autres, les actes de désobéissance civile. Celle-ci conduit en effet la communauté « au bord de la dissolution », contraignant « le pouvoir de l’État à l’invention institutionnelle ».
On mesure ainsi, a contrario, le double déficit qui se creuse aujourd’hui dans nos démocraties : d’un côté, un déficit de contestation et d’insurrection (manque d’imagination et/ou d’efficacité des mouvements politiques, syndicaux, associatifs, corrélé à la montée des populismes et des communautarismes) ; d’un autre côté, un déficit de constitution (crises des institutions représentatives, gouvernementales, judiciaires, impuissance de l’État face à la finance et aux pouvoirs transnationaux – impuissance davantage organisée que subie par lui-même, du reste…). Démocratiser la démocratie, ce serait donc renforcer à la fois la fonction contestataire des mouvements sociaux et la fonction constitutionnelle de la puissance publique.
Ce qui fait que la désobéissance est « civile » ne se trouve donc ni du côté de sa finalité morale (la défense des droits naturels et imprescriptibles de l’homme) ni du côté des moyens (la non-violence), mais dans le fait qu’elle est un acte politique qui, pour le dire comme Althusser, est une manière « d’interpeller » l’appareil d’État sur la manière dont lui-même interpelle les individus en sujets. S’il faut retenir une dimension de la définition canonique de la désobéissance civile, c’est assurément le fait qu’il s’agit toujours d’un acte public, politique. C’est d’ailleurs ce seul critère distinctif que retient Hannah Arendt dans son texte célèbre sur la désobéissance civile : « la distinction nécessaire entre une violation ouverte et publique et une violation clandestine », entre « le criminel qui prend soin de dissimuler à tous les regards les actes répréhensibles et celui qui fait acte de désobéissance civile en défiant les autorités et s’institue lui-même porteur d’un autre droit »[32]. Dans ce texte superbe, écrit dans un contexte particulier (deux ans après Mai 68, en pleine guerre du Vietnam et alors que le mouvement civique afro-américain se radicalise), Arendt critique avec virulence la confusion entre désobéissance civile et objection de conscience, ciblant en particulier Thoreau, dont la désobéissance, motivée par des raisons strictement morales, est qualifiée « d’apolitique »[33], pure « expression subjective »[34] se dressant contre d’autres consciences individuelles – par exemple celle du gouverneur du Mississipi de l’époque, « lui aussi profondément convaincu de la justice de sa cause » (le maintien de l’esclavage) et prêt, « pour la défendre, à aller en prison »[35].
« La plus grande erreur, écrit Arendt, serait d’estimer que l’on se trouve en présence d’individus qui se dressent, au nom de leur conscience et de leur subjectivité, contre les lois et les coutumes de la communauté »[36]. À cette conception héritée de la philosophie chrétienne[37], elle oppose la désobéissance comme acte politique qui, en tant que tel, est à la fois l’énonciation pour ainsi dire performative d’un « désaccord » (« dissent ») sur les lois en vigueur, et l’expression d’un « consentement tacite » au monde commun (dont tout homme fait partie dès sa naissance)[38]. Le dissentiment, autrement dit, « implique le consentement » – non pas consentement à des principes de justice que je devrais présupposer en tant qu’être rationnel (comme chez Rawls ou Habermas), mais consentement, « inséparable de la condition humaine »[39], au monde historique qui m’entoure et à sa pluralité intrinsèque. Et précisément le « grand danger » qu’Arendt voyait dans la situation des Indiens et des Noirs aux États-Unis, c’était leur « exclusion tacite » hors du « consentement tacite ». À travers la désobéissance, le mouvement civique noir revendique en réalité son inclusion dans le monde commun (et c’est bien en cela qu’elle est « civile »).
Le droit que le désobéissant revendique et exerce en même temps en désobéissant, c’est ce qu’Arendt appellera, dans un autre texte célèbre[40], « le droit d’avoir des droits » [41], autrement dit le droit d’avoir une place dans le monde – non pas au sens d’une appartenance nationale ou communautaire, mais d’une sphère publique de concitoyens se reconnaissant mutuellement comme des égaux[42]. Ce droit d’avoir des droits n’est donc ni un droit positif (il ne doit pas être confondu avec les droits fondamentaux reconnus par exemple aux réfugiés ou aux détenus), ni un droit naturel, puisqu’il n’est pas une « propriété » ou une « qualité » que l’individu possèderait en propre, mais « des qualités que les individus se confèrent les uns les autres dès lors qu’ils instituent un monde commun »[43]. Ce droit est « à la fois absolu et contingent »[44] – absolu puisqu’inconditionnel, universel, mais contingent puisque dépendant de la reconnaissance horizontale, mutuelle des individus entre eux comme citoyens égaux. Ce que Balibar appelle « le Théorème d’Arendt » (complément au « Théorème de Machiavel ») consiste donc à conjoindre « dialectiquement » le droit d’avoir des droits et la désobéissance civile. Autrement dit, le droit « horizontal » à la citoyenneté est indissociable d’une insurrection, d’une effraction qui est elle-même instituante, créatrice de liens, ce qui fait dire à Balibar qu’en effet, en démocratie, « sans possibilité de désobéissance, il n’y a pas de légitimité de l’obéissance »[45].
La désobéissance civile ne consacre donc pas la supériorité de la morale sur la politique, comme s’il s’agissait de faire valoir les droits imprescriptibles de notre conscience, dans la logique d’une éthique de la conviction. Elle signifie plutôt que le politique ne coïncide jamais avec lui-même, que le citoyen ne peut jamais consentir à la loi qu’en se préservant le droit d’y désobéir, dans une logique qui est plutôt celle d’une éthique de la responsabilité – au sens de répondre de : j’interpelle le pouvoir pour qu’il réponde de ses actes, comme je m’engage moi-même à répondre de mes propres actes. Car dans l’optique d’une éthique de la responsabilité, comme le dit Max Weber, « je ne peux pas (me) décharger sur les autres des conséquences de (ma) propre action : ces conséquences sont imputables à ma propre action » [46]. C’est ce qui ressort aussi du texte d’Arendt : le risque que l’on prend à désobéir réside moins dans le risque légal encouru, que dans le risque politique : l’erreur de jugement, la possibilité de se tromper d’objectif (sur l’axe des fins) et/ou de stratégie (sur l’axe des moyens)[47].
Pour le dire encore autrement, la désobéissance civile ne s’évalue pas à l’aune de l’opposition morale bien/mal (les droits c’est « bien », le pouvoir c’est « mal »), mais selon une structure proprement politique, entre ceux qui consentent au monde tel qu’il est et ceux qui n’y consentent décidément pas…
[1] Ph. Gérard, « Les enjeux politiques d’Antigone », in Antigone et la résistance civile (sous la dir. de L. Couloubaritsis et Fr. Ost ), Bruxelles, Editions Ousia, 2004, p. 185-203.
[2] Ibid., p. 187.
[3] Ibid., p. 203.
[4] Cl. Lefort, Essais sur le politique, Paris, Seuil, 1986.
[5] J-F. Lyotard, Le différend, Paris, Minuit, 1981.
[6] J. Rancière, La mésentente, Paris, Galilée, 1996.
[7] E. Balibar, L’Europe, l’Amérique, la guerre, Paris, La Découverte, 2005, p.125.
[8] Ch. Mouffe, Agonistique (2013), trad. D. Beaulieu, Paris, Beaux-Arts de Paris Editions, 2014.
[9] J-F. Bayard, L’impasse national-libérale. Globalisation et repli identitaire, Paris, La Découverte, 2017.
[10] Ch. Mouffe, L’illusion du consensus, trad. P. Colonna d’Istria, Paris, Albin Michel, 2016.
[11] E. Laclau et Ch. Mouffe, Hégémonie et stratégie socialiste (1985), trad. J. Abriel, Paris, Les Solitaires Intempestifs, 2009.
[12] J. Rawls, Théorie de la justice (1971), Paris, Seuil, 1987, § 57.
[13] Cl. Lefort, Essais sur le politique, Paris, Seuil, 1986, p. 29.
[14] Rapprocher Foucault de Hegel n’est qu’un paradoxe apparent. Tous deux partagent l’idée que les figures du sujet se transforment avec les formes de communauté, que le devenir-sujet est conditionné par le monde historique dans lequel il vit. Cf. C. Colliot-Thélène, La démocratie sans « demos », Paris, PUF, p. 2.
[15] Le cas le plus flagrant étant celui de S. Laugier et A. Ogien, Pourquoi désobéir en démocratie ?, Paris, La Découverte, 2010 et Le principe démocratie, Paris, La Découverte, 2014.
[16] E. Desmons, « Droit de résistance et histoire des idées », in Pouvoirs, « Désobéir en démocratie », n° 155, 2015, p. 30.
[17] E. Thiers, « La désobéissance civile : entre Antigone et Narcisse : l’egodémocrate », in Pouvoirs, « Désobéir en démocratie », n° 155, 2015.
[18] E. Balibar, « Lénine et Gandhi : une rencontre manquée ? », in Violence et civilité, 2010, p. 305-321. Entre les deux types de révolution (violente versus non-violente, sociale versus nationale, politique versus religieuse), Balibar montre comme un chassé-croisé qui révèle une grande complexité. Rappelons ainsi que la politique de la non-violence prônée par Gandhi a fini par basculer dans son contraire – un déchainement de violence communautaire qui dure toujours, mais qui, surtout, participe en réalité du même complexe religieux que l’ascèse gandhienne.
[19] Quand le premier magistrat de Belgique, anticipant un mouvement de grève possible des magistrats, compare le fonctionnement de la Justice à la situation d’un « Etat voyou », que fait-il, sinon douter du caractère démocratique de l’Etat belge ?
[20] L. Bantigny, « Le principe d’Antigone », in Pouvoirs, « Désobéir en démocratie », n° 155, 2015, p. 17.
[21] D.H. Thoreau, On the Duty of Civil Disobedience. Le titre original donné par Thoreau en 1849 est « Resistance to Civil Government », qui montre que Thoreau reste dans la conceptualité du vieux droit naturel de la « résistance à l’oppression ». C’est l’éditeur qui aurait choisi le titre « civil disobedience » pour l’édition posthume du texte (1866), sur la suggestion de Thoreau lui-même. Parmi la dizaine de traductions françaises, cf. La désobéissance civile : du devoir de désobéissance civique, trad., notes et postface de J-P. Cattelain, Bats, Utovie, 2007.
[22] Laugier et Ogien semblent conjoindre les deux figures, ne cessant de faire référence à Thoreau, à la voix singulière, à la confiance en soi, à l’exercice de l’autonomie, mais voyant en même temps dans les occupations de place ou dans l’activisme informatique de nouvelles formes de démocratie « sauvage » récusant toute centralité étatique ou partisane (S. Laugier et A. Ogien, Le principe démocratie. Enquêtes sur les nouvelles formes du politique, Paris, La Découverte, 2014).
[23] Il y aurait aussi celle d’Antigone femme défiant le pouvoir patriarcal incarné par Créon. Cette réappropriation féministe d’Antigone est un phénomène récent, mais massif. Lecture anachronique si l’on veut suggérer qu’Antigone serait une sorte de militante de l’égalité femme/homme, mais assez juste si l’on se rappelle que la tragédie met en scène une sauvagerie, une altérité, une étrangeté. Antigone est « l’emmerdeuse » qui jette le trouble dans la politique ; non pas celle qui oppose l’amour à la loi (cliché sexiste), non pas celle qui oppose la religion à l’État (anachronisme), même pas celle qui se révolte contre la loi, mais celle qui prétend dire la loi, faire la loi. (F. Duroux, Antigone encore, les femmes et la loi, Editions Côté-femmes, 1994).
[24] C. Castoriadis, Domaines de l’homme. Les carrefours du labyrinthe II, Seuil, 1986, p. 300 et suiv. Dans L’insignifiance tragique (Paris, Gallimard, 2001), Florence Dupont va encore plus loin, rappelant qu’à Athènes, la tragédie était une performance rituelle, et certainement pas un genre littéraire. Elle insiste sur le caractère événementiel et éphémère des tragédies : Sophocle avait destiné son Antigone qà une seule et unique performance, et pas au panthéon des œuvres immortelles.
[25] C. Colliot-Thélène, La démocratie sans « demos », Paris, PUF, 2010.
[26] Ibid., p. 10.
[27] Ibid., p. 13.
[28] E. Delruelle, Citoyenneté nomade et Etat-nation ? La politique des immigrés est-elle une biopolitique ?, in Tumultes, n° 40, 2013.
[29] C. Colliot-Thélène, La démocratie sans « demos », Paris, PUF, 2010, p. 17.
[30] E. Balibar, La proposition de l’égaliberté, Paris, PUF, 2010, p. 20.
[31] E. Balibar, L’Europe, l’Amérique, la guerre. Réflexions sur la médiation européenne, Paris, La Découverte, 2005, p. 127.
[32] H. Arendt, « La désobéissance civile » (1970), in L’Humaine Condition, Quarto Gallimard, 2012, p. 894.
[33] Ibid., p. 883. Elle épingle deux citations de Thoreau : (1) « ce peuple doit cesser d’avoir des esclaves, et cesser de faire la guerre au Mexique, même s’il devait lui en coûter son existence en tant que nation » (à cette dernière partie de phrase, Arendt oppose Lincoln : « l’objectif primordial doit être de sauvegarder l’Union, et non pas celui de préserver ou d’abolir l’esclavage ») (p. 884) ; (2) (Thoreau) déclarait « ne pas être responsable du bon fonctionnement de la machine sociale », ne pas être « fils de son ingénieur » (p. 885).
[34] Ibid., p. 885
[35] Ibid., p. 886.
[36] Ibid., p. 910.
[37] Ibid., p. 887.
[38] Ibid., p. 903.
[39] Ibid.
[40] « Le déclin de l’Etat-Nation et la fin des droits de l’homme », in H. Arendt, Les Origines du totalitarisme (1951), Paris, Quarto Gallimard, 2013, p. 561-607.
[41] « Le droit d’avoir des droits », c’est-à-dire « de vivre dans une structure où l’on est jugé en fonction de ses actes et de ses opinions » (ibid.).
[42] « Notre vie politique repose sur la présomption que nous sommes capables d’engendrer l’égalité en nous organisant, parce que l’homme peut agir dans un monde commun, qu’il peut changer et construire ce monde, de concert avec ses égaux et seulement avec ses égaux » (ibid., p.605) Cf. la très belle analyse de Justine Lacroix et Jean-Yves Pranchère, Le procès des droits de l’homme, Seuil, 2016, p. 279 et suiv.
[43] E. Balibar,, « Arendt, le droit aux droits et la désobéissance civique », in La proposition de l’égaliberté, PUF, 2010, p.209. Cf. aussi les développements sur « l’insoumission comme « droit » », in E. Balibar, Citoyen-sujet et autres essais d’anthropologie philosophique, Paris, PUF, 2011, p. 439 et suiv.
[44] E. Balibar,, « Arendt, le droit aux droits et la désobéissance civique », in op.cit., p. 209.
[45] Ibid., p. 214.
[46] M. Weber, Le savant et le politique, Plon, 10/18, 1995.
[47] Ibid., p. 215.