Créé en 1995, le CEDEM est un centre interfacultaire ayant pour but d’effectuer toute recherche théorique ou empirique dans les domaines des migrations humaines, des relations ethniques et du racisme. Il s’intéresse notamment aux relations entre les processus migratoires et les inégalités de développement. Ces recherches sont menées dans une perspective pluridisciplinaire : science politique, sociologie, anthropologie, relations internationales, droit.
Le Centre veut en outre constituer un forum de réflexion et d’information stimulant les recherches concernant les dimensions incontournables que sont aujourd’hui les dynamiques culturelles, identitaires et sociales et les rapports au Politique.
A travers l’organisation de séminaires et de rencontres académiques, le CEDEM entend aussi, d’une part, encourager le débat autour des différentes facettes des migrations et des minorités ethniques en l’insérant dans un contexte international et, d’autre part, initier un réexamen approfondi de nos catégories d’analyse.
Le CEDEM : les caractéristiques de l’approche et du positionnement scientifiques
L’approche et le positionnement scientifiques du CEDEM se sont constitués et consolidés au départ d’une préoccupation, qui s’exprime dans les travaux de ses premiers membres, au sujet de la notion de pouvoir dans les sociétés d’immigration. Au rythme des chercheurs qui l’ont rejoint et au fur et à mesure des études et des travaux réalisés, les problématiques et les méthodes se sont affinées.
Sur le plan intellectuel, l’intention n’a jamais été de forger une posture théorique commune strictement définie. Du reste, la diversité des diplômes, des formations, des profils, des recherches et des centres d’intérêt et des lectures des membres du CEDEM aurait rendu celle-ci impossible à réaliser. Néanmoins, avec le temps, il est possible de décrire plusieurs caractéristiques du positionnement qui unit les membres d’une équipe et qui caractérise sa façon de travailler, les outils utilisés et les buts recherchés. En effet, même si le pluralisme théorique est toujours resté de mise, le CEDEM a forgé une identité que partage la plupart de ses chercheurs et dont le lieu géographique est la sociologie politique du changement social et politique provoqué par les migrations d’après la deuxième guerre mondiale.
Sur le plan des disciplines, la démarche du CEDEM est fondamentalement transdisciplinaire. D’une part, les chercheurs représentent collectivement plusieurs disciplines. D’autre part, des cadres de recherches transdisciplinaires sont volontairement favorisés dans l’élaboration des travaux (recherches, articles, thèses, etc.) . D’une manière générale, la science politique, la sociologie, l’histoire, la philosophie politique, l’anthropologie, les relations internationales et le droit constituent les disciplines le plus souvent mobilisées dans nos travaux. Toutefois, l’ancrage premier demeure historiquement la sociologie politique en raison de la formation principale des fondateurs du CEDEM. Quoi qu’il en soit, cet ancrage semble logique dans la mesure où la sociologie politique concerne à la fois le social et les identités collectives (politiques, nationales, culturelles, ethniques, etc.), mais aussi le rapport du social au politique et aux politiques publiques.
Par ailleurs, le CEDEM prend part aux débats académiques au sein de différents espaces linguistiques, en particulier francophone et anglophone. Sur le plan méthodologique, la diversité des approches caractérise aussi le travail du CEDEM avec une préférence pour la démarche qualitative. Celle-ci n’est toutefois pas exclusive. L’approche habituelle consiste à étudier pour chaque projet, quelle est, ou quels sont, les outils méthodologiques les plus appropriés pour obtenir les résultats les plus fiables. C’est ainsi que la liste des publications de recherches menée au cours de ces quinze dernières années ne manque pas d’offrir des perspectives plus quantitatives sur certaines problématiques comme, par exemple, la perception subjective des discriminations. Il faut enfin signaler que le CEDEM a peu à peu développé une expertise dans certaines techniques qualitatives d’investigation, comme les « focus groups », même si l’objectif ultime n’est pas de contribuer à l’avancement des théories sur les méthodes d’approche du terrain. Le CEDEM réalise souvent des monographies. Lorsque les moyens le permettent, ses chercheurs ont parfois aussi menés des recherches dans une perspective comparative. Celle-ci ne manque pas d’intérêt dans la mesure où elle joue un rôle de vérification et où le comparatif permet de mieux contrôler certaines généralisations. Elle permet aussi d’éviter ce qu’il est aujourd’hui convenu d’appeler les pièges du « nationalisme méthodologique ».
Compte tenu de ses centres d’intérêt et de son souci comparatif, le CEDEM accorde une énorme importance à la dimension géographique de son action, du local au global.Autrement dit, le CEDEM développe des recherches à caractère tant local, régional, communautaire, national, européen que global. Le CEDEM s’inscrit donc logiquement dans différents réseaux de recherches et dans différents partenariats avec des instituts équivalents situés aux quatre coins de la planète, du nord au sud : Europe, Maghreb, Etats-Unis, Amérique Latine et récemment, Australie. Seul centre belge a avoir été sélectionné comme membre du réseau d’excellence européen IMISCOE, son implication dans l’espace européen de la recherche mérite à ce niveau d’être soulignée.
En ce qui concerne la conception des liens entre le monde de la recherche et le monde politique, le CEDEM ne vise pas pas à intervenir dans la mise en œuvre des politiques publiques. Il vise cependant à s’assurer que l’expertise qu’il a développé sur ces matières soit mise à la disposition du pouvoirs publics afin que la connaissance nécessaire à l’élaboration de choix politiques judicieux et à la mise en œuvre de politiques publiques pertinentes soient le plus largement disséminée. L’aide à la décision basée sur des recherches produites au CEDEM ne doit pas être confondue avec la consultance qui consiste à donner un avis sur une problématique sans entreprendre une recherche scientifique à proprement parler. En d’autres mots, le CEDEM a fait le choix de préconiser la recherche scientifique politiquement pertinente au détriment du travail de consultance. Par ailleurs, le partenariat avec la société civile, les organisations non-gouvernementales, les associations et les médias est également au cœur de nos préoccupations. La recherche scientifique du CEDEM se veut aussi citoyenne. Il est important de mettre nos résultats à la disposition des personnes et organisations intéressées et c’est ce que nous nous efforçons de faire à travers nos publications et nos participations régulières à des tables-rondes, conférences, séminaires, etc.
Enfin, si les thèmes de recherche sont nombreux, de la gouvernance des migrations et de la diversité culturelle à la citoyenneté, à l’Islam et aux mobilisations sociales et politiques, en passant par le racisme et la xénophobie, le projecteur est le plus souvent braqué sur la ville. C’est en effet au niveau urbain que les dynamiques migratoires et ethniques sont les plus significatives, faisant de la ville et du quartier le terrain de recherche le plus favorable à l’accumulation de connaissances sur ces questions.
Marco Martiniello et Hassan Bousetta